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Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle.

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Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle. Empty Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle.

Message par Lucy Austen Mer 3 Mai - 21:21

La division est la crainte des monothéistes. Le protestantisme est une division du christianisme provoquée par Luther mais sans préméditation. Uber Bost : "une naissance sans faire-part". Martin Luther est un moine parmi tant d'autres. Zwingli et Calvin ont aussi une grande importance dans l'établissement d'une nouvelle relation de l'Homme à Dieu. La Réforme propose une nouvelle formule, équation qui permet aux fidèles d'accéder au Salut.
Luther est un moine obscur, dont la volonté de changement commence par une expérience individuelle. Il rencontre dès son vivant beaucoup de pro et de contra.
Lucas Cranach (1472-1563) peint La vraie et la fausse Église vers 1546. A gauche, la religion réformée, promesse de paix. A droite, l'Église catholique, douleur et désolation.

I- Martin Luther : l'homme de la rupture
1. Un fils du peuple, un excellent moine
a. Enfance et formation.
b. L'affaire des indulgences et les 95 thèses.
c. Le corpus luthérien.
2. Diffusion de la réforme luthérienne
a. Ce que Luther n'est pas...
b. L'Allemagne et la réforme (1525-1555).

II- Les réformes périphériques
1. Zwingli et la réforme en Suisse
a. Un "Luther" suisse ?
b. L'extension de la réforme en Suisse.
2. La réforme de Strasbourg
a. Un foyer d'humanisme très actif.
b. Réforme tolérante et humaniste.
3. La via media anglicana
a. Le roi et l'Église d'Angleterre au début du XVIème.
b. Les effets de la Réforme.
c. La politique religieuse des Tudors.

III- Jean Calvin (1509-1564), une seconde génération de protestants
1. Les années de formation
a. Études et conversion (1509-1534).
b. Une vie de proscrit (1535-1541).
2. Le maître de Genève
a. Calvin entre Genève et Strasbourg.
b. Organisation de l'Église calviniste.

Lucy Austen

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Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle. Empty Re: Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle.

Message par Lucy Austen Mer 3 Mai - 21:44

I- Martin Luther : l'homme de la rupture
1. Un fils du peuple, un excellent moine
a. Enfance et formation.

Comme Paul sur le chemin de Damas, comme François d'Assise, Luther éprouve à un moment de sa vie la révélation de l'importance de Dieu.

Il naît en 1483 à Eisleben, près de Magdebourg, de son propre aveu aux confins du monde civilisé. Il est le fils cadet d'une famille humble mais pas pauvre, Hans et Margarethe Luther (peints par Cranach), paysans reconvertis dans les mines qui ont atteint une certaine aisance. L'idée de promotion sociale est très importante pour eux. Luther suit donc des études très soignées, afin de devenir officier pour le compte de la région dont fait partie Eisleben. Il suit l'ambition de ses parents. Il étudie à la petite école du village, puis à la cathédrale de Magdebourg, gérée par les frères de la vie commune, puis à l'université d'Erfurt dont il sort diplômé en 1505 (maître ès arts, c'est-à-dire du premier cycle de la faculté). Il accomplit donc la base d'une étude universitaire et doit continuer dans le droit. Le 2 juillet 1505, il est pris dans un orage qui le terrifie, et fait à Saint-Anne le vœu de devenir moine s'il en réchappe, par peur de mourir loin des siens, sans extrême-onction. C'est une sorte de conversion à laquelle on assiste. Il annonce le 17 juillet sa décision et entre chez les ermites de Saint-Augustin, cénobites non bénédictins. Il n'opte pas, donc, pour un ordre classique, mais pour un ordre où la règle est particulièrement dure, où est présente une dimension de souffrance. Il n'échappe pas à son vœu, comme il aurait pu le faire avec l'achat d'une indulgence.

Il se révèle un excellent moine. Il entre au monastère en 1505, reste novice et prononce ses vœux définitifs en 1506. Il mène une carrière ecclésiastique relativement rapide, devient prêtre en 1507 et fait sa première messe peu après. Il est un moine très éminent dans sa société. En 1510, il est envoyé à Rome pour défendre son courant, la façon dont s'organise la communauté allemande de celui-ci auprès de son représentant général. Il est donc porteur d'un message conservateur. Certains disent que ce voyage à Rome, par ailleurs un échec, n'a eu aucune influence sur lui ; d'autres que ce voyage a été un tournant, qu'il a été pour Luther l'occasion de constater la décadence à Rome. Au retour, il devient enseignant en philosophie, poursuit ses études de théologie et en devient docteur en 1512.

Il n'est pas un humaniste, il n'a pas la même culture qu'eux. C'est dans une perspective traditionnelle qu'il lit les textes classiques, il n'est pas dans une jubilation intellectuelle mais méditative.

Il change de couvent pour Wittenberg, et continue d'enseigner dans la petite université de celle-ci, en théologie cette fois. Fondée en 1502, elle n'a pas vraiment de passé et laisse donc plus de liberté, d'autant plus qu'elle est un milieu humaniste. Luther travaille sur la Bible, donne des cours sur les textes qui en sont issus : sur les psaumes entre 1513 et 1515, ainsi que sur les textes de Paul, notamment l'Épître aux Romains. Là se pose une question énorme : qu'est-ce que la justice divine ? La justice d'un Dieu tout-puissant, qui distribue punitions et récompenses, c'est-à-dire une justice rétributive, auquel cas le chrétien doit multiplier les œuvres, indulgences et jeûnes ? Ou alors une qualité que Dieu donne aux hommes, auquel cas ils ne peuvent pas influer dessus mais seulement garder une position de confiance ? Cette seconde option constitue un véritable soulagement : Dieu donnerait à l'Homme la qualité d'être juste, d'être sauvé. Luther en arrive à la conclusion que l'Église qui a valorisé la première a fait une lecture fautive, partielle. Il remet en cause le pouvoir de ceux qui ont accès au texte. Il réinterprète les textes et en tire deux conséquences : il ne faut pas s'angoisser et il faut étudier le texte en dehors de l'Église. Cette vision des choses est une solution qu'il a trouvée à ses propres angoisses : lui-même a subi l'angoisse de son salut lors de l'orage, mais même après être entré au couvent, cette angoisse ne s'est jamais calmée.

Cette nouvelle espérance est représentée graphiquement par Lucas Cranach en 1529 : La Foi et la Grâce. Ce sont les deux façons dont on peut comprendre la justice divine : à gauche la loi, le dieu vengeur, la danse macabre, les tables de la loi. A droite la Grâce, qui a donné au Chrétien une qualité d'espérance et de foi : Dieu bienveillant, chrétien dans la contemplation. L’œuvre est un succès.
Luther remet en cause le monopole d'interprétation de l'Église, donc une partie de son autorité.


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Lucy Austen

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Message par Lucy Austen Mer 3 Mai - 22:58

b. L'affaire des indulgence et les 95 thèses.

De plus, Luther décrédibilise son propre choix de vie. Il met en question l'utilité de sa "moinerie", pour lui-même (puisqu'il n'a pas apaisé sa panique) et par rapport aux paradoxes et aux contradictions du clergé régulier. Il tient des discours très violents contre le clergé régulier puis contre le clergé séculier.
Avec les 95 thèses, il fait intervenir le débat dans l'espace public. Il oppose à l'Église puissante l'intelligence du savant, du sachant.

A partir de 1515, dans l'espace germanique, une grande publicité est donnée aux indulgences, dont la recette est censée servir à la nouvelle basilique Saint-Pierre de Rome. Luther n'est pas opposé à l'idée de remise de peine (au bout d'un pèlerinage, d'un grand nombre de prières) mais dénonce les abus de cette pratique : il n'approuve pas nécessairement l'investissement dans un monument, à but prestigieux, et encore moins le deuxième emploi, à savoir le remboursement des frais engagés par l'archevêque de Mayence (Albert de Hohenzollern) pour atteindre sa position. Devant l'outrance de cette collecte, le discours de Luther se radicalise. C'est un dominicain qui s'occupe de la campagne de promotion de 1515 dans l'archevêché de Mayence : Johann Tetzel (1465-1519), "So bald das Geld im Kasten klingt, die Seele aus dem Fegefeuer springt". Luther se présente comme soucieux de ses fidèles, ainsi qu'un pasteur de son troupeau. Il écrit à l'archevêque de Mayence pour lui signifier son opposition à la pratique des indulgences et placarde ses 95 thèses sur la porte de la chapelle du château de Wittenberg, c'est-à-dire de la résidence de son référent hiérarchique et autorité politique directe, Frédéric de Saxe. Il souligne la vanité de Frédéric, avec son comportement excessif (20 000 reliques). L'affichage se déroule au soir du 31 octobre ou au 1er novembre 1517, donc à la Toussaint.

Pourquoi "thèse" ? Le mot renvoie à la pratique scolastique. Il s'agit de 95 propositions de ce en quoi Luther croit, qui appellent à un échange de points de vue. 62 : "le vrai trésor de l'Église est le sacro-saint Évangile". Le vrai nom en est : "95 thèses sur la vertu des indulgences" : il ne s'agit pas d'un programme de réforme. Luther a l'intention de provoquer un débat de savants, de spécialistes. Tetzel lui répond effectivement avant la fin de l'année, avec 166 thèses. Luther répond par un Sermon sur l'Indulgence et la Grâce, où il affirme que la Grâce est offerte gratuitement, plusieurs fois édité. Puis le débat bascule : on sort de la querelle des moines pour un conflit institutionnel et politique. Le pape Léon X convoque Luther pour un procès, sur un soupçon d'hérésie.
Hérésie = déviance par rapport à la doxa. A l'intérieur de la religion, une mauvaise interprétation. Il ne s'agit pas de créer un Dieu nouveau : Luther n'est soupçonné que de dévier de l'orthodoxie. Les non-chrétiens sont des infidèles ou des païens.

Le procès, de l'avis du pape, devrait se tenir à Rome. Mais Frédéric de Saxe obtient qu'il ait lieu dans l'Empire, où le pouvoir sera toujours aux mains au mieux d'un prince allemand, au pire de Charles Quint, ce qui laisse plus de possibilités d'agir. Frédéric de Saxe est atteint dans sa conviction religieuse et y trouve un intérêt politique : l'adhésion à la Réforme permet aux princes allemands de revendiquer leur indépendance. A tous les enjeux, institutionnels et politiques, s'ajoute donc une question allemande.
Le procès a lieu à Heidelberg et repose sur une disputatio. Luther est confronté à des savants en avril 1518, notamment Cajetan (Thomas de Vio), issu de l'ordre des dominicains, au sommet de la pyramide. Une seconde séance a lieu en 1519, contre Jean Eck. C'est chaque fois la même chose : Luther expose sa compréhension des textes à des envoyés du pape qui répondent par la suprématie de celui-ci. Les positions, "Infaillibilité du texte vs infaillibilité du pape et des concile", sont irréconciliables : on ne peut prouver les indulgences et l'Église ne peut pas reconnaître son erreur. Luther est condamné par la bulle pontificale de Léon X en juin 1520, "exsurge domine", qui déclare 41 de ses thèses comme hérétiques, lui donne ?? jours pour se rétracter, et brûle ses écrits par autodafé en octobre 1520. En réponse, Luther accuse le pape d'être l'antéchrist, brûle les décrétales (= obligations qui s'opposent au chrétien et qu'il trouve fausses) et le texte le condamnant, à Wittenberg, en décembre 1520. Il est excommunié le 3 janvier 1521.

L'empereur est chrétien, il a une dimension pieuse. Il a vécu dans la devotia moderna. Il a une mission de protection de l'Église. Il convoque Luther en avril 1521, à la Diète de Worms. Il essaye de résoudre l'unité politique de son Empire, et doit composer avec les religieux pour cela. Il ne se pose pas comme celui qui va valider une position religieuse (il n'est pas théologien, il n'en a pas la légitimité) mais comme celui qui va résoudre la distorsion, la fêlure causée par Luther dans la chrétienté et au sein du christianisme. Une solution est encore attendue malgré l'excommunication.
Luther arrive à Worms acclamé par les foules sur le chemin. Il est célèbre. L'empereur lui demande d'abjurer, de se rétracter, en lui donnant une journée et une nuit de méditation. Luther refuse de reconnaître l'infaillibilité du pape. Charles Quint proclame sa position : il s'engage à lutter contre l'hérésie luthérienne. Il proclame l'édit de Worms qui met Luther au ban de l'Empire : il est en plus du reste coupable de lèse-majesté impériale. Personne ne doit l'aider ni avoir ses écrits entre les mains. Double dimension d'unité chrétienne et d'unité de l'empire. Mais les princes allemands ne sont pas tous d'accord. Ils revendiquent, quand ils sont pro-luthériens, non seulement leur conviction personnelle, mais aussi leur liberté par rapport au pape (ce qui fournit également des avantages fiscaux) et par rapport à l'empereur. Quand Luther quitte Worms pour revenir à Wittemberg, il est en danger : il risque la prison s'il reste sur le territoire. Il est alors "enlevé" par les soldats de Frédéric le Sage et confiné dans le château de la Wartburg.


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Lucy Austen

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Message par Lucy Austen Sam 6 Mai - 0:48

c. Le corpus luthérien.

Il a été construit en plusieurs étapes.

• Premier étage : socle. Il est constitué avant 1521, dans les années 1519-1520.
- Sermon sur les bonnes œuvres, juin 1519 : toute œuvre accomplie sans la foi n'aura pas de répercussion.
- La Papauté de Rome, août 1520, en allemand : le pape peut se tromper. Seul le texte ne se trompe pas.
- Manifeste à la noblesse chrétienne de la nation allemande, 1520, en allemand : un triple blocage empêche les laïcs d'accéder au salut, soit la muraille entre les clercs et eux, l'accès au texte restreint aux seuls clercs et la possibilité de réunir un concile confiée au pape seul. Il s'agit d'un vrai programme de réforme de la société qui bénéficie de plusieurs rééditions.
- Prélude sur la captivité babylonienne de l'Église, 1520, en latin : il ne faut garder que deux sacrements sur les sept.
- Traité de la liberté chrétienne, novembre 1520 en allemand, décembre 1520 en latin : idée du sacerdoce universel, selon laquelle tout fidèle peut être intercesseur auprès de Dieu.

Le lectorat potentiel est important, de 400 000 lecteurs. Ce socle repose sur les principes de sola gratia, sola fide, sola scriptura : le chrétien atteint Dieu grâce à la seule grâce, à sa seule foi, à la seule écriture, donc pas à travers des indulgences ou des pèlerinages.

• Second étage : fruit de ses travaux à la Wartburg. Luther a une forte activité de traduction.
- Nouveau Testament : 1522.
- Ancien Testament : jusqu'en 1534. Il y avait déjà des traductions en langues vulgaires, mais il les estimait mauvaises. Il agit ici selon le mode de l'humanisme.

C'est un travail essentiel pour la langue allemande, qui ouvre une troisième voie entre la langue du peuple et la langue sèche de l'administration.
Luther définit les choses à garder, les choses à prêcher aux luthériens, lance des polémiques. C'est un cadre pour les réformateurs, mais aussi une base qui permet aux catholiques de lui répondre.
Des dissensions internes naissent : d'autres continuateurs se présentent, complètement dans ses pas, un peu à côté (Calvin) voire de manière très radicale, instrumentalisée. C'est le cas de deux de ses disciples : Andras Bodenstein "Carlstadt" et Thomas Müntzer, à côté desquels Luther est très modéré.

Carlstadt (1480-1541), professeur de théologie lui aussi, va au-delà de ce que dit Luther. Il poussa la réduction de la liturgie jusqu'à l'hyper dépouillement. C'est lui qui propose de retirer toutes les représentations figurées des les lieux de célébration religieuse. Les manifestations d'iconoclasme ne sont pas étrangères au christianisme, selon certaines périodes, mais à la pensée luthérienne, si. Il prêche un "christianisme des simples", qui se dispense de toute forme d'intermédiaire. Aucun outil, aucune théologie ne sont nécessaires pour atteindre Dieu. Luther s'oppose à ce mouvement dès 1523-1524, et obtient l'expulsion de Carlstadt de la Saxe par Frédéric le Sage.

Thomas Müntzer (1490-1525) est également un réformateur pionnier. Il pousse à l'extrême le principe de sola scriptura. Pour lui, cette médiation ultime est encore perçue comme excessive, le meilleur contact que le fidèle peut avoir avec Dieu est de l'ordre de la transe, il est direct. Müntzer propose d'atteindre Dieu par un état second que le fidèle peut atteindre par l'hyper mortification. Luther le qualifie de fou dangereux, et Müntzer, obligé de se faire itinérant, trouve refuge en Suisse avec Carlstadt. Il veut casser tout référent, tout cadre : c'est aussi une revendication politique. Il cause dans les campagnes des velléités de rébellion. C'est lui qui inspire des révoltes paysannes par l'idée que si tout le monde rejoint le mouvement, on atteindra une sorte de royaume de Dieu sur Terre. En 1525, il se trouve à la tête d'une armée qui a pour vocation de détruire toute forme d'autorité. Il se fait arrêter et exécuter la même année.


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Message par Lucy Austen Sam 6 Mai - 13:22

2. Diffusion de la Réforme luthérienne
a. Ce que Luther n'est pas...

La Réforme luthérienne a pu être mal comprise sur plusieurs points.

- Elle ne souhaite pas bouleverser l'ordre. Elle n'est pas subversive.
Exemple : guerre des Chevaliers, 1522-1523. La petite noblesse d'Allemagne a perdu son rôle prépondérant, la fonction guerrière, depuis la fin du Moyen-âge, parce que les armées se professionnalisent, du fait de l'amélioration des techniques. Elle est déclassée, elle est pleine d'une frustration identitaire et politique. Elle voit dans la Réforme l'occasion de se distinguer dans la société, les idées à la main, sans compter que nier l'autorité du pape dispense de certains impôts. Émerge un courant très revendicatif, piloté par Ulrich von Hutten et Frantz von Sickingen, plus hauts que la petite noblesse et dotés d'une formation humaniste. Ils entrent en rébellion, pénètrent le territoire de l'archevêque de Trèves, l'occupent et en font le siège. Sickingen est à la tête d'une armée de 6 000 hommes. On interprète donc le courant luthérien comme créateur de désordre, ce qui est faux, et justement, peu de temps après, Luther prend position contre ce mouvement parce qu'il a besoin des princes pour fortifier son mouvement. Luther parle d'une liberté intérieure, pas d'une liberté totale ni d'une hyper-démocratie. La rébellion s'arrête.

- Luther n'est pas un soutien au petit peuple. Le protestantisme n'est pas un mouvement "socialiste".
Exemple : guerre des Paysans, 1525-1526, particulièrement dans la région du Rhin. Les impôts très forts, les corvées et l'oppression provoquent des jacqueries depuis longtemps et avant Luther : une vingtaine ont eu lieu en cent ans, entre le début du XVè et le début du XVIè. Mais avec Luther, elles ont l'occasion de se colorer d'un point de vue identitaire. Elles contestent les seigneurs toujours catholiques, avec des actions assez violentes et spectaculaires, comme les incendies de châteaux pour détruire des documents. Müntzer récupère la révolte paysanne pour en faire une révolte politique, avec la mise en place de communautés paysannes fondées sur le partage. Il est présent sur le terrain. C'est une coalition de princes qui met fin à la révolte et épure les campagnes avec la bataille de Frankenhausen, en 1525. Müntzer est arrêté, torturé puis décapité. Cette guerre et ses 70 000 morts sont un traumatisme dans l'histoire allemande. En mai 1525, Luther écrit Contre les hordes criminelles et pillardes des paysans et recommande de châtier durement les révoltés. Les princes ont désormais une raison de plus de suivre Luther : ils ont la conviction que sa religion est factrice d'ordre, que les Luthériens seront toujours soumis à leur autorité. C'est une des raisons de la réussite de la Réforme.

- Luther n'est pas un pur produit de l'humanisme. Ce troisième point est toutefois moins spectaculaire.
Il s'interroge sur l'identité germanique, se préoccupe de l'histoire allemande, et est influencé par l'humanisme, en ce qui concerne le retour aux sources, la recherche d'une religion plus individuelle, plus profonde, plus sincère, mais des dissensions subsistent entre eux, sur les outils notamment : Érasme considère que les œuvres ont toujours du sens. On peut pister cette proximité et cet éloignement grâce à leur correspondance. Érasme, jusqu'en 1520, essaye de faire le lien entre le pape et Luther, au point qu'il leur sert parfois de médiateur. Érasme écrit le Traité du libre-arbitre, en 1524 : le chrétien a le choix entre ce qui est bien et ce qui est mal, il peut œuvrer pour son salut. 1525 : Luther répond par Du serf-arbitre et de la liberté du chrétien. La seule liberté du chrétien est de considérer qu'il n'en a pas, qu'il peut seulement croire. La volonté humaine est "une bête de somme entre Dieu et Satan". Seul avoir la foi permet d'obtenir la grâce. Luther est en décalage avec les humanistes.

Il correspond aux attentes des différents groupes sociaux. Il peut être intéressant pour les nobles et pour les paysans.
Il ne veut pas détruire les autorités, mais il n'est pas opposé à l'adoucissement de la condition paysanne.


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Message par Lucy Austen Sam 6 Mai - 19:42

b. L'Allemagne de la Réforme (1525-1555).

Les espaces qui basculent les premiers dans la Réforme sont les villes, car elles sont des poches de richesses : Strasbourg, Nuremberg, Ulm, Francfort (en 1530 pour cette dernière).
La conversion se propage à partir de 1523. Elle touche des espaces hétérogènes, très vastes comme "simples" cités dotées d'un pouvoir politique. La Hesse et la Saxe prennent parti pour Luther, ce qui pose problème avec Charles Quint, qui reste catholique. C'est un front religieux qui se construit, entre ceux qui se convertissent et ceux qui restent catholiques. Charles Quint convoque une diète à Augsburg, en 1530, pour résoudre le clivage religieux. Il réunit les princes catholiques, qui dénoncent les novations, et les princes protestants, qui expriment trois points de vue différents : confessio augustana (Melanchthon), Tétrapolitaine (Bucer), Fidei Ratio (Zwingli). Il ne s'agit plus de savoir qui va l'emporter entre catholiques et protestants, mais qui va l'emporter entre les différents mouvements protestants. Les protestants ne renoncent à rien, et la Diète, échec complet, s'achève sur un ultimatum : les protestants ont un an pour rétablir l'ordre.
- Philippe Melanchthon (1497-1560) vient présenter la doxa luthérienne avec motion de la confessio augustana, Luther étant banni.
- Martin Bucer (1491-1551), le réformateur de la ville de Strasbourg, vient apporter la doxa de celle-ci, qui est aussi celle de Memmingen, de Constance et de Lindau.
- Zwingli présente les particularités de la Suisse, qui voulaient voir leurs idées présentées par quelqu'un d'autre que Melanchthon.
La différence entre les trois concerne l'eucharistie : est-elle totalement, partiellement ou pas du tout le corps et le sang du Christ ? Les clivages confessionnels sont exacerbés. On en arrive à la création de ligues, notamment celle de Smalkalde, réformés pilotés par Philippe de Hesse et Jean-Frédéric de Saxe, successeur de Frédéric. A la faveur des relations internationales, notamment du problème de Soliman le Magnifique, mais aussi des problèmes intérieurs, il y a des moments de conflits et des moments de pause.

À Münster éclot un mouvement si extrémiste que catholiques et protestants s'allient contre lui : l'anabaptisme. Il dérive des idées de Réforme, mais présente de nombreuses particularités :
- Il prophétise la fin du monde comme un facteur imminent ; il faut réorganiser complètement le peuple pour être prêt à cette fin du monde, et pour cela, rebaptiser les adultes.
- Tout le monde peut prophétiser et parler de Dieu, on n'a pas de clergé.
- La violence envers les non-anabaptistes est autorisée. C'est un équivalent de guerre Sainte.
- Les biens et les personnes (polygamie) sont mis en commun, pour la survie de cette nouvelle communauté, fragile.
L'évêque, jeté hors de la ville, la reconquiert grâce à une coalition de protestants et de catholiques. Le mouvement, achevé en 1535, est d'inspiration du hollandais Jan Matthijs (1500-1534) et poussé à son comble par Jean de Leyde, brûlé en 1535.

La ligue de Smalkalde a de plus en plus d'importance. Face à elle s'établit, en 1538, la ligue catholique de Nuremberg (ville passée à la Réforme mais revenue au catholicisme), pilotée par le duc de Bavière. A partir de 1540, la ligue de Smalkalde s'affaiblit un peu, du fait de la mort de Luther mais aussi du premier conflit militaire. Les tensions extérieures, en effet, se calment. La guerre de Smalkalde se solde par une victoire de Charles Quint à la bataille de Mühlberg, en 1547. Les deux leaders sont capturés et la ligue de Smalkalde dissoute. Afin de parvenir à un traité, on convoque à nouveau l'ensemble des élites politiques de l'empire, mais les négociations échouent et les combats reprennent, avec cette fois l'appui logistique de la France qui, pas spécialement réformée, sait où est son intérêt par rapport à Charles Quint.
Les protestants remportent des victoires à Innsbruck (1552) et à Metz (1552), source d'un pouvoir ecclésiastique important, dont Charles Quint fait le siège avant de renoncer face à François de Guise au bout de quatre mois. Ambroise Paré, chirurgien, s'illustre à Metz en inventant une manière d'éviter la septicémie et en soignant les blessés des deux camps. C'est la fin des combats, Charles Quint cherche donc le compromis. Il est blessé dans l'idée de la mission impériale qui lui a été confiée, dans son idée d'empereur chrétien : il abdique et laisse ses successeurs régler les choses. La solution politique arrive en septembre 1555, avec la paix d'Augsburg, signée à l'issue d'une diète. Elle est à la fois très ouverte et très rigidifiante : l'empereur reconnaît la présence de deux religions dans l'Empire, le catholicisme et le luthéranisme, mais les territoires doivent être unifiés dans leur confession. C'est le principe du cujus regio, ejus religio. C'est le prince qui prend la décision, à laquelle les sujets se plient ou partent. Après avoir manifesté cette responsabilité, le prince est très lié au pouvoir religieux dans la religion réformée. L'Église luthérienne est irrémédiablement liée au pouvoir politique.
La paix d'Augsburg est faite pour durer. Elle interdit de faire la guerre pour imposer l'une ou l'autre des religions : la guerre confessionnelle est proscrite. La paix d'Augsburg ne reconnaît cependant que deux religions : qu'en est-il des calvinistes, des zwingliens ? Il n'y a pas de reconnaissance des mouvements non-luthériens. La paix d'Augsburg n'est pas une solution pour les territoires notamment périphériques, mais elle a au moins un effet anesthésiant sur les autres mouvements au cœur même de l'Empire.
Allégorie de l'abdication de l'empereur Charles Quint à Bruxelles, Frans Francken le Jeune, 1620. Philippe II, fils de Charles Quint, reçoit une partie importante de l'Empire, notamment les espaces non-germaniques, et Ferdinand, frère de Charles Quint, récupère le titre impérial. Charles Quint se retire dans le monastère de Yuste et y meurt en 1558.

On parle de luthéranisme par rapport à ce nouveau courant. Le luthéranisme est une façon d'envisager la Réforme, la rupture avec l'église catholique, ce n'est pas la seule, mais Luther a une aura, un charisme spectaculaires. Il est quasiment un mythe vivant et incarne véritablement son courant, il est aimé et détesté.
A partir des années 1525-1526, il intervient beaucoup moins dans l'espace public, et son courant est plus incarné par ses disciples que par lui. Il épouse Catherine Bora, fonde une famille de six enfants.
Son discours se fait moins universaliste, il prêche moins. Son discours est davantage domestique. C'est Melanchthon qui transforme, qui met en forme la doctrine de Luther.
Le principal axe de réformation n'est pas les indulgences, mais la hiérarchie de la société, au travers du clivage clercs-laïcs. Luther prône une égalité entre les croyants, mais il fait preuve de forte intolérance religieuse, envers catholiques et juifs. Il n'est pas dans un discours œcuméniste. Les textes qu'il écrit sont outrageux envers le Pape, une critique qui arrive à son comble dans le recueil iconographique réalisé avec Lucas Cranach l'Ancien (ex : L'Âne-pape, 1545). Propos injurieux : "(??)", "(??)". "Je te dis merde", après le concile de Trente. Hercules Germanicus, en 1522, par Hans Holbein le Jeune. Luther meurt en 1546.


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Message par Lucy Austen Sam 6 Mai - 21:01

II- Les réformes périphériques

Réforme "périphérique" : géographiquement, par rapport au centre de l'onde de choc allemande. Périphérique ne signifie pas secondaire. Il n'y a pas une Réforme mais plusieurs Réformes.

1. Zwingli et la Réforme en Suisse
a. Un "Luther" Suisse ?

Entre Zwingli et Luther, il y a des points communs, des désaccord de fond, mais aussi un contexte politique différent. C'est tout cela qui les rend si proches et si lointains.
Leurs idées naissent parallèlement et non successivement. Zwingli le revendique : "que les papistes ne m'appellent pas luthérien parce que je n'ai pas appris la doctrine du Christ de Luther mais bien de la parole de Dieu elle-même".

La Suisse est un espace constitué de 13 cantons, piliers de la confédération suisse, et de territoires avec un statut particulier (ex : Bailliages). Cet ensemble est en pratique autonome de l'empire, mais la reconnaissance officielle de cette autonomie ne viendra qu'au XVIIème siècle.
Elle est donc un conglomérat avec des alliances possibles et une conscience politique suisse, pas seulement un morceau de l'Empire. C'est dans un espace clivé et original que Zwingli présente sa Réforme, un espace dans lequel il n'y a pas d'autorité suprême qui donnerait une légitimité particulière à la religion catholique. Les autorités jouent à l'échelle locale. Son terrain de prédication est la ville, c'est aux bourgeois qu'il parle, contrairement à Luther, confronté aux princes et aux théologiens. Zwingli n'est pas un moine mais un curé, il a une grande pratique de la messe, de la prédication.

1484-1531 : Zwingli est l'exact contemporain de Luther. Il naît dans le canton de Saint-Gall, au nord-est de la Suisse, dans une famille de paysans aisés. Son oncle est prêtre et se charge de sa première éducation en latin. Il mène une carrière universitaire classique, dans plusieurs universités, dont celle de Bâle. Il est maître es arts en 1502 ou 1503. Il développe une grande culture humaniste, approfondit ses connaissances en latin, grec et hébreu. Il fait le même diagnostic que Luther sur l'Église, ce qui ne l'empêche pas de devenir prêtre en 1506. Il obtient une cure dans la région de Glaris, et continue sa vie jusqu'aux guerres d'Italie menées par Louis XII et François Ier. Zwingli y suit l'armée en tant qu'aumônier, pour suivi spirituel des troupes, et sera un promoteur de la neutralité suisse. Il rencontre Érasme à Berne, puis arrive à Zurich, en 1518, y étant appelé pour prêcher à la cathédrale, pas en tant qu'évêque mais tout de même en tant qu'acteur important. Il est confronté à un auditoire et, dans ses sermons, il commence à faire monter ses interprétations et idées nouvelles. En 1519 éclate une épidémie de peste à Zurich. La moitié de la population est décimée. Zwingli soigne, est atteint et guérit. Il expérimente une fois de plus la fragilité de la vie et interprète sa survie comme un signe de la grâce de Dieu. Ensuite, ses idées deviennent le principal thème de ses sermons, de plus en plus radicaux. Il critique l'Église et commence à critiquer le dogme. Il abandonne son rôle de prêtre à Glaris.
- Purgatoire : il n'existe pas. Il dit là, en somme, la même chose que Luther. Le Purgatoire ne sert à rien, les Indulgences ne servent à rien : finalement, on ne peut améliorer son Salut.
- Intercession des saints : ils n'ont pas vocation à recevoir tant d'attention.
- Célibat des prêtres : il ne souhaite pas de scission entre des laïcs et des clercs qui se distinguent par un comportement exceptionnel.

En 1522, il se marie secrètement. Il crée un scandale, au Carême, en défendant un imprimeur pris en train de manger des saucisses. Il affirme que le jeûne n'a pas d'importance pendant Carême, que l'Église doit s'attacher à l'esprit du chrétien et que juger sur la nourriture est incohérent.
La rupture passe dans l'espace public. L'évêque responsable de la province ecclésiastique, évêque de Constance, tente de faire condamner Zwingli à l'échelle locale, par les autorités municipales de Zurich. Le pouvoir municipal de Zurich est très fort, et il refuse de se faire dicter sa conduite par l'évêque de Constance. Il organise une dispute pour trancher en conscience entre les deux positions. Ces disputes ont lieu entre 1522 et 1523 et c'est Zwingli qui a l'avantage. Cela le pousse à mettre ses idées en forme, avec 67 thèses : rejet des œuvres, supériorité de l'autorité du Christ et de la Bible sur celle de l'Église, défense du sacerdoce universel (ni clerc ni laïcs : chacun est responsable de son Salut.) On retrouvait ces thèmes avec Luther, mais il y a des différences : Zwingli n'articule pas sa pensée autour des indulgences ; il s'attache plus à la sola scriptura qu'à la sola fide et à la sola gratia. Il traduit en allemand et accompagne ces thèses d'un commentaire. Il passe très vite à une explication pédagogique de ce qu'il pense.

Zwingli est protégé par Zurich. Il a le droit de dire ce qu'il dit, mais il doit s'expliquer pour assurer sa légitimité face à une double concurrence : celle des catholiques et celle des anabaptistes. Les anabaptistes, à Zurich, dans les années 1522-1523, revendiquent leur particularité en luttant contre les images (tableaux, statues, décorations), question à laquelle Luther n'a pas été confronté. Plusieurs disputes : la ville de Zurich prend position contre les images en 1524. Plus de tableaux, de crucifix, d'icônes, de musique, de processions avec les reliques. Zwingli intègre cet iconoclasme à ses idées.

A partir de 1525, la Réforme zwinglienne se diffuse. Zwingli est associé à Conrad Pellikan et à Leo Jud pour la diffusion sociale dans la ville de Zurich. Dans la cathédrale, on prêche ce que pense Zwingli. Il est donc actif dans ces bâtiments religieux, et il est par ailleurs élu au sein des autorités municipales. Il est intégré à la vie politique et pourvoyeur de moyens sociaux en même temps qu'au tissu religieux de la ville, où il a fait ses preuves.

Modification de la société. Le système catholique est cassé. Par exemple, le soutien aux pauvres n'est plus alimenté. Des tribunaux matrimoniaux apparaissent, qui peut prendre des décisions en matière de mœurs. Ce sont les autorités municipales qui peuvent prononcer l'excommunication. Des réunions de la prophétie apparaissent également, pour permettre à chacun de se documenter : les prédicateurs chevronnés et les novices lisent ensemble les textes pour en améliorer leur compréhension et pour diffuser les textes en langue vulgaire. Ces réunions ont pour but de former des pasteurs, des gens avec suffisamment d'expérience pour pouvoir à leur tour former les autres à la compréhension des textes. L'argent qui permet de mettre tout cela en place est celui qu'on utilisait à l'entretien de la cathédrale, pour les chanoines par exemple.

Zurich devient un laboratoire de pensée. Zwingli écrit en 1525 un Commentaire sur la vraie et la fausse religion, texte très violent contre le pape. En 1526, Zwingli est excommunié. En 1529, Philippe de Hesse organise sa rencontre avec Luther. Ils ont pour intérêt de coordonner l'action des réformés pour leur donner plus de poids. Ils cherchent une base commune. C'est la rencontre de deux leaders, pas d'un élève et d'un maître. Ils en arrivent à un texte en 14 points, sur ce qu'est un réformateur au XVIème siècle. Les 13 premiers sont les points communs (critique de l'Église), le 14ème une différence, sur la cène (= eucharistie pour les catholiques) : ils divergent sur son interprétation, ce qui fait qu'ils ne pourront jamais se confondre. La conception qu'en a Luther est plus proche de celle des catholiques : le pain et le vin portent réellement la présence du Christ. Pour Zwingli, la religion est dépouillée de toute référence matérielle (iconoclasme), et il applique ce principe à la cène. Le pain et le vin ne sont qu'une commémoration, une cérémonie du souvenir. Le plus important dans la messe, c'est la lecture des textes.


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Message par Lucy Austen Mer 10 Mai - 17:29

b. Extension de la Réforme à Zurich.

Chaque canton suisse a ses propres institutions locales. C'est une compilation, relativement souple. Dans une telle configuration, l'hétérogénéité religieuse est mieux permise, parce qu'il n'y a pas de structure uniformisée. Certains cantons choisissent d'adopter la Réforme, d'autres non. Cela exalte les rapports de force, qui ne sont toutefois pas nés au XVIème siècle, et divisent la Suisse alémanique de la Suisse romande. La diffusion de la religion réformée suit les clivages économiques, entre des cantons plus urbains et des cantons plus montagnards ou ruraux où le dialogue universitaire est plus difficile.
On voit naître un front religieux entre les cantons catholiques et réformés. Les cantons centraux (Lucerne, Unterwalden, Uri, Schwitz...) qui constituent le cœur suisse condamnent la Réforme. Le canton de Berne, lui, y bascule en 1528. Avec Zurich, il apparaît comme un pôle et prend les catholiques en sandwich.
- Berchtold Haller : fait la promotion des idées de Zwingli à Berne et s'allie avec les autorités municipales, travaille avec elles.
- Œcolampade (Johannes Häusgen) : même processus à Bâle. À chaque fois, le choix religieux est porté, sans mouvements révolutionnaires.
- Joachim Vadian : même chose à Saint-Gall.
Une grande partie de la Suisse romande est acquise à la Réforme.

Œcolampade est un humaniste. Il accomplit une trajectoire de lettré. Issu d'une famille bourgeoise, il fait des études de droit et de théologie, et devient prêtre en 1510. Ami d'Érasme, il rejoint le groupe humaniste d'Erlenburg autour de Sickingen ; il choisit là la Réforme. Sa trajectoire est comparable à celle de Guillaume Farel.

Les cantons optent pour leur propre religion mais la promeuvent également dans les territoires sous leur influence. C'est le cas pour Berne, qui a une influence sur Genève, pour Zurich sur Appenzel (qui reste mixte) et Glaris. Accords de combourgeoisie = accords qui formalisent une sorte de protectorat sur un autre État (allié, bailliage, canton plus faible).
La Réforme s'étend donc à Genève, Glaris, Appenzel.
Le front religieux crée des tensions très fortes, et amène certains à chercher des appuis en-dehors de l'espace suisse. Les cantons montagnards/ruraux du centre et les territoires sous leur influence (les bailliages italiens), sur leurs gardes, viennent demander son aide à Charles Quint en tant que Habsbourg, mais aussi au pape. La guerre est évitée en 1529 (première guerre de Kappel) mais éclate en 1531 : seconde guerre de Kappel. Elle se solde par la victoire des catholiques. L'avancée protestante est bloquée (mais pas inversée), le front religieux se cristallise. Très peu de territoires modifient leur appartenance religieuse ensuite, exception faite de Genève (principalement), mais l'influence protestante l'avait déjà en partie atteinte. Les troupes réformées sont accompagnées par Zwingli, les armes à la main. Il meurt et son corps est brûlé comme hérétique par les catholiques.

Pour Luther, c'est Melanchthon qui a assuré le "service après-vente". Pour Zwingli, il s'agit de Heinrich Bullinger (1504-1575). Il est son successeur. Humaniste ayant étudié à Köln, docteur en théologie en 1523, érudit en grec et en hébreu, il épouse une ancienne nonne. Proche de Zwingli, il l'aide à consolider son mouvement à Zurich. L'espace n'est pas uniforme : il y a toujours des catholiques, des anabaptistes, contre lesquels il lutte. Il est donc prédicateur, mais aussi auteur. Il organise la pensée zwinglienne. Il cherche le compromis. Il refuse les confrontations violentes, même intellectuelles, sans restreindre pour autant son projet. Il a la capacité d'influencer les courants réformateurs en Angleterre, en Italie.
Bullinger et Calvin se rencontrent dans les années 1540. Il œuvre à accorder leurs projets. En 1546, ils signent tous deux un texte, équivalent du texte en 14 points. Leurs convergences sont beaucoup plus importantes, en particulier à propos de la cène, belle et bien, pour eux deux, déconnectée de toute présence réelle du Christ.

Zurich et Genève s'affirment comme deux pôles de la Réforme, qui n'ont pas vraiment d'équivalent pour Luther. Il n'a pas la même accroche territoriale, il ne voit pas le même processus s'accomplir. Luther est un itinérant, il ne parle pas avec le peuple, mais avec les princes et les théologiens.


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Message par Lucy Austen Mer 10 Mai - 17:34

2. La Réforme de Strasbourg
b. Un foyer d'humanisme très actif.

Strasbourg contient 30 000 habitants, un nombre relativement important. Elle appartient à l'Empire jusqu'au XVIIème, mais dispose d'un statut très favorable : "libre d'Empire". C'est une ville commerçante et pas universitaire, artisane, carrefour, ouverte, prospère, une ville européenne, avec une grande réputation sur la facilité d'y commercer, d'y résider.
Le fonctionnement politique de la ville de Strasbourg est mis par écrit dans une lettre de serment qu'on lit tous les ans, comme une Constitution. Strasbourg s'apparente donc à une République démocratique, malgré les limites évidentes de ce rapprochement. Un maire est élu tous les ans, parmi les corporations, l'élite économique de la ville, et assisté par des conseils : plusieurs instituions représentatives (de la noblesse, du commerce...) qui fonctionnent bien. S'y ajoute une assemblée, plus large que toutes les autres : l'assemblée des 300 échevins. Le pouvoir n'est pas déconnecté de sa base.
Elle dispose de beaucoup d'églises : la population ecclésiastique très nombreuse. Une cathédrale, 15 grands couvents (de 200-300 moines), 20 petits couvents, sans compter les petites églises de paroisse. Pourtant, l'évêque n'est pas une autorité politique. Les bourgeois ont obtenu au XIIIème siècle qu'il n'ait pas le droit d'habiter à Strasbourg. La forte présence ecclésiastique, l'hyper piété, le fort encadrement et le très grand intérêt de la population pour la question religieuse s’accommodent avec l'amour de celle-ci pour sa liberté. Après des choix très stricts, la hiérarchie ecclésiastique n'a pas le même poids qu'ailleurs.
La population strasbourgeoise est lettrée, éveillée à la question luthérienne depuis le début. Règne à Strasbourg une grande tolérance religieuse, et y cohabitent des vaudois, des anabaptistes, etc.


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Message par Lucy Austen Mer 10 Mai - 17:46

b. Réforme tolérante et humaniste.

Le passage à la Réforme est encadré par les autorités. Strasbourg s'y intéresse grâce à l'arrivée de prédicateurs, comme Matthieu Zell, curé à Strasbourg, qui connaît très bien les théories de Luther. Il prêche en relayant les idées luthériennes et se fait excommunier par le pape. Martin Bucer (1491-1551) et Wolfgang Capiton (1478-1541) prennent sa suite.

Wolgang Capiton, venu de Suisse, a fait des études de médecine, de droit et de théologie dont il est docteur. Excellent en hébreu, humaniste, il connaît Érasme et Zwingli. Il arrive à Strasbourg en 1523, est accueilli dans une des nombreuses églises de la ville, et accède à un statut social élevé par son mariage avec une fille de Strasbourg. Il passe officiellement dans la Réforme en 1524.
Martin Bucer vient d'une famille plus modeste. Issu de l'ordre des dominicains, il fait des études de théologie. Convaincu par les disputes de Luther auxquelles il assiste, il quitte son ordre, épouse une nonne défroquée, se fait excommunier, et arrive enfin à Strasbourg où il prêche.

Les autorités municipales traitent ce problème de façon démocratique. Les 300 échevins décident que les idées réformées doivent être élargies.
- On place des prédicateurs dans chacune des sept paroisses de la ville et on aide fortement à la diffusion.
- Les chanoines n'exercent plus mais sont toujours financés, pour ne pas risque l'opposition des grandes familles. En revanche, les couvents sont fermés et les biens nationalisés pour l'assistance aux pauvres/l'assistance publique dont s'occupait l'Église.
Dans le même esprit, on crée des écoles primaires dans toutes les paroisses pour les garçons et les filles. L'Écriture a une importance capitale.

Années 1530 : profondes changements. Victime de son hyper ouverture aux anabaptistes et radicaux, Strasbourg doit mettre en place, clarifier son programme religieux. S'agit-il d'un mélange de Luther et de Zwingli, d'un troisième courant ?
En 1531, elle prend la décision de supprimer les images, de s'approprier le droit d'excommunication.
En 1533, elle crée le Convent, nouvelle assemblée ecclésiastique. Les prédicateurs et certains membres des autorités municipales y participent et ont pour mission de régler les problèmes de discipline. Elle permet de donner une structure idéologique.
• Ce qui fait l'originalité de Strasbourg c'est la création de la Haute École (= Académie), en 1538, par Jean Sturm (1507-1589) qui propose une éducation particulière. Elle recrute Bucer, Capiton, Calvin, dans le but de former de nouveaux pasteurs, de former tous ceux qui veulent faire des études supérieures sans passer par la fac de théologie. Héritage de l'humanisme chrétien, elle enseigne la scolastique et l'hébreu (??). Calvin enseigne de 1538 à 1541, et fonde plus tard, en 1549, une académie du même type à Genève. D'autres voient le jour : à Nîmes, à Lauzanne, puis plus tard à Saumur (1599 ??, grâce à Duplessis-Mornay).
La Réforme de Strasbourg est bienveillante, elle prend idéologiquement un peu de tout. Mais ce n'est plus le cas après 1547, après Mühlberg. Bucer doit quitter Strasbourg et est remplacé notamment par Jean Marbach, luthérien, bien moins conciliant, qui interdit la diversité religieuse. La Haute École est reprise en main, Jean Sturm meurt et l'enseignement humaniste est remplacé par un enseignement plus proche de la Bible. C'est la fin de la Réforme strasbourgeoise dans ce qu'elle a d'original.


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Message par Lucy Austen Jeu 11 Mai - 17:29

3. La via media anglicana

Cette Réforme périphérique répond à un modèle différent des autres. Elle n'est pas due à un prédicateur mais à un souverain. Un système insulaire est propice au développement de particularités, propice à la rébellion. L'Angleterre est vaste, puissante, clivée. C'est un acteur politique qui sort d'un XVème siècle difficile. Elle fait partie des États, comme la France et les Habsbourg, qui entretiennent des liens serrés avec le pape. Il s'agit d'une autorité centralisée autour de Londres, autour d'un roi, pas comme en Allemagne ni en Suisse. Les souverains apportent leur marque personnelle, ce qui peut amener à des paradoxes. Ils se montrent arbitraires dans leurs choix politiques, dans les innovations pragmatiques. L'anglicanisme est une forme d'affirmation d'identité nationale.

a. Le roi et l'Église d'Angleterre au début du XVIème siècle.

Contexte au moment du schisme henricien, décor des corps religieux et politiques.

L'Angleterre est un territoire profondément christianisé, avec une piété vive, florissante. Le mécontentement vis-à-vis de la fiscalité ecclésiastique est ancien et très vif, encore plus qu'ailleurs. Les contraintes de l'institution pèsent. La papauté s'immisce dans les affaires de justice anglaise, par exemple. En effet, il y a plusieurs niveaux de tribunal ecclésiastique : évêque, archevêque, pape. Comme ailleurs en Europe, le pape est donc amené à gérer des clercs. Cette justice romaine qui vient supplanter la justice anglaise cause des mécontentements. L'Angleterre est jalouse de son autonomie.

Humanisme. Le milieu humaniste est incarné par Thomas More (1478-1535), John Colet (1467-1519) mais aussi Érasme qui forma de nombreux théologiens. Comme le cénacle de Meaux, ils sont sensibles aux dérives de l'Église. La "petite Allemagne" en constitue un équivalent. Elle se réunit pour travailler, dans le cadre d'un humanisme chrétien, à voir ce qu'il y a à régler dans l'Église (nicolaïsme, simonie), à retraduire les textes. Comme son nom l'indique, il y a une porosité entre leurs idées et celles de l'Allemagne. Thomas Cranmer (1489-1556), le plus influencé par les idées luthériennes, atteint le poste d'archevêque de Canterbury (la plus prestigieuse des deux provinces ecclésiastiques, devant York). Il établit un diagnostic classique : l'Église très chrétienne critique l'institution de Rome, dans un milieu intellectuel et humaniste. Mais ce diagnostic a tout de même une particularité. Les critiques réactivent une vieille contestation théologique, mais aussi politique et sociale, celle que Wycliff avait portée à la fin du XIVème siècle, dans un souci de retour à la pureté du texte biblique. Sa pensée ne s'est pas diffusée en Europe, mais dans les îles britanniques, oui. Le peuple a lu dans Wycliff une invitation à renverser l'ordre établi, ce qui a causé des révoltes dans son sillage, équivalents de la guerre des Paysans, qui ont marqué les consciences. Les disciples de Wycliff sont appelés lollards. On appelle ainsi les paysans révoltés, mais les vrais lollards sont des intellectuels. Ils sont considérés comme des hérétiques et poursuivis par la loi de 1401, "de haeretico comburendo". Mais les idées restent, il ne manque qu'une étincelle.

Pendant longtemps, un divorce est impossible dans l'Église catholique. On peut faire annuler un mariage, notamment quand on se rend compte que les deux époux sont trop proches selon leur arbre généalogique. En revanche, l'Église n'admet pas le divorce pour stérilité féminine. Une autre solution consiste à s'appuyer sur des cas particuliers dans la Bible.
Or, dans le cas d'Henri VIII (1491-1547) et de Catherine d'Aragon, il ne s'agit pas seulement d'un argument juridique, mais aussi d'un problème politique.
Henri VIII n'est pas destiné à être roi mais évêque, étant le cadet de la famille. Il reçoit une formation théologique exceptionnelle. Son frère Arthur est censé prendre la succession, il est marié à Catherine d'Aragon mais meurt en 1502 sans avoir consommé le mariage.
Catherine d'Aragon est la fille des rois catholiques, la nièce de Charles Quint. La famille royale obtient du pape Jules II une dispense pour que ce très bon parti puisse épouser le frère d'Arthur, Henri, qui devient Henri VIII en 1509, à la mort de son père Henri VII. C'est le Deutéronome dans l'Ancien Testament (25-5) qui fournit la référence.
Le mariage est consommé. En résultent six grossesses, dont cinq garçons mort-nés et une fille, Mary (1516-1558), reine entre 1553 et 1558. Cela pose problème : avoir une reine à la tête de l'Angleterre n'est pas interdit, mais la dynastie en place n'est pas bien consolidée, elle est chancelante, ce qui est une mauvaise configuration. Henri VII a peur d'un manque de légitimité. Il souhaite donc avoir un fils. De plus, il interprète cette succession d'enfants mort-nés comme la manifestation du courroux de Dieu vis-à-vis de ce mariage, et enfin, il est très amoureux d'Anne Boleyn. Il pose donc sa demande en 1526 (??), et la justifie par deux citations du Lévitique. Mais le contexte politique pose problème. Henri VIII envoie des émissaires en 1527 auprès du pape Clément VII, or celui-ci est dans une situation difficile, du fait du sac de Rome de 1527 : Charles Quint ne veut pas que le pape possède le nord de la péninsule italienne. Le pape ne peut pas, dans cette situation, s'opposer à Charles Quint ; or Catherine d'Aragon en est la nièce.

Il s'adresse donc aux savants. En 1530, il envoie sa question à 18 universités européennes, dont 8 seulement (en Angleterre, France et Italie) lui répondent positivement, ce qui n'est pas suffisant.
Il résout donc la rupture chez lui. Il se déclare "empereur absolu et pape en son royaume", et se fait excommunier en 1534. Le mariage avec Catherine d'Aragon est annulé en 1533. Il épouse Anne Boleyn, et Thomas Cranmer célèbre leur mariage. Or Anne Boleyn lui donne une fille, la future Elisabeth Ière.

Le schisme se formalise en 1534 :
- Acte de Succession, texte qui reconnaît comme seule descendance légitime d'Henri VIII la descendance qui lui donnera Anne Boleyn. On arrête de payer les annates (= argent que les monarchies doivent au pape).
- Acte de Soumission, par lequel le clergé se soumet au roi.
- Acte de Suprématie, qui dit qu'"Henri VIII est le chef suprême de l'Église d'Angleterre."


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Message par Lucy Austen Jeu 11 Mai - 17:42

b. Les effets de la Réforme.

Henri VIII mène un coup politique. Contrairement aux autres, son problème n'est pas de faire reconnaître le modèle (par le haut) mais de le généraliser (par le bas). Il dispose d'une certaine légitimité : il a écrit en 1521 un ouvrage sur la Défense des sept sacrements. Il s'y présente comme un champion de la doctrine catholique et obtient de Léon X (??) le titre de defensor fidei. C'est bien par un problème politique que sa rupture est causée, et ce sera encore le cas par la suite (non-linéarité religieuse).
Avant 1533, c'était Thomas More qui était proche du roi. Ensuite, il s'agit de Thomas Cromwell (1485-1540), bras droit d'Henri VIII, chargé de cette généralisation évoquée, laïc, équivalent d'un premier ministre. Il forme un tandem avec Thomas Cranmer.
Les évêques doivent reconnaître Henri VIII comme chef de l'Église et renoncer à l'autorité du pape. Le évêques et les abbés sont élus désormais, mais parmi des candidats choisis par le roi. Henri VIII maintient l'institution ecclésiastique : il n'est pas luthérien.
La Réforme passe relativement bien chez les séculiers, moins chez les réguliers. Thomas More refuse de prêter serment à l'Acte de Suprématie. Il est arrêté pour traîtrise et exécuté en 1535, à la Tour de Londres. Il est considéré comme le premier martyr catholique victime de l'anglicanisme, ce qui lui vaudra d'être canonisé en 1935. Mais on ne peut pas éliminer de même tout le clergé régulier.
En 1536, Thomas Cromwell et Henri VIII prononcent la dissolution des communautés monastiques. C'est la raison d'être sociale et l'activité économique de 11 000 moines et moniales qui est supprimée. Les hommes peuvent rejoindre le clergé séculier. 825 monastères sont supprimés, leurs biens sont nationalisés. Les terres et bâtiments rejoignent le trésor, sont distribués auprès des favoris du roi ou revendus à des particuliers. Il n'y a pas d'investissements dans l'intérêt public comme à Zurich. Cette dissolution cause des tensions très fortes, malgré l'enracinement de la Réforme auprès de ceux qui ont obtenu ces biens, d'où le soulèvement du Pèlerinage de Grâce, réprimé dans le sang mais moins qu'en Allemagne.
L'évolution de cette Réforme est liée aux problématiques politiques des Tudor, d'où des phases qui s'alternent durant le règne d'Henri VIII. La seule chose qui n'est pas remise en cause, c'est la suprématie du roi.

- Directement après 1533, les premières déclarations en matière de foi sont plutôt inspirées par les luthériens. L'Acte des dix articles, 1536, est la première déclaration politique d'Henri VIII en matière de foi. Pour lui, [color=#c9c9c9]trois sacrements doivent être gardés (baptême, eucharistie, pénitence), le Christ est réellement présent dans l'eucharistie et les œuvres sont utiles.
- Progressivement, il durcit sa position (1537, 1538...) : interdiction des reliques, des pèlerinages, des images. En 1539, chaque paroisse reçoit l'obligation d'avoir en permanence une Bible exposée (en anglais) sur un lutrin dans sa nef.
Anne Boleyn, accusée d'adultère, est décapitée en 1536. Henri VIII épouse Jane Seymour, flamande, qui lui donne un fils (futur Edward VI) et meurt en couches. Il scelle ensuite un mariage politique avec Anne de Clèves, qu'il ne supporte pas mais l'influence vers le luthéranisme, avant sa répudiation en 1538.
- En 1539, l'Acte des six articles amène une rechristianisation. Tous les articles sont catholiques, seule l'autorité du pape n'est pas rétablie. Henri VIII n'a plus besoin des appuis des princes protestants. On décapite ceux qui étaient trop pro-luthériens, dont Thomas Cromwell. Il épouse Catherine Howard, puis Catherine Parr.
Le schisme henricien a permis l'élaboration d'une Église nationale. Parmi les fidèles de cette Église henricienne, on trouve : des "Henriciens", des catholiques devenus des parias, ainsi que des réformés luthériens/calvinistes/zwingliens qui se sont réfugiés en 1536.


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Message par Lucy Austen Jeu 11 Mai - 17:48

c. La politique religieuse des Tudor.

Quand Henri VIII meurt (1547), il laisse un passif lourd. La royauté est particulière, théocratique, elle décide de ce que les sujets doivent penser en matière religieuse.
Edward VI, fils de Jane Seymour, prend le relai en 1547, à travers une période de régence. La phase qui s'ensuit est pro-Réforme à nouveau : Edward VI a été élevé par des précepteurs sensibles aux idées protestantes et celui qui exerce la régence en est convaincu. Cette fois cependant, les idées tendent vers le calvinisme. Le régent, Edward Seymour, frère de Jane, est en correspondance avec Calvin. Les six articles sont abolis. On réunit une commission pour établir une nouvelle liturgie : la messe est une commémoration ; iconoclasme ; comme Henri VIII, Edward VI délabre un peu plus les institutions. Il nationalise les églises non paroissiales, les hôtel-Dieu, les collèges, et réprime fortement les contestations, pacifie l'Angleterre. L'Acte des 42 articles de 1553 qui fonde une Église d'État pro-Zwingli/Calvin, devient un livre de référence. Les tensions sont toujours fortes. Lorsqu'Edward VI meurt (1553), il y a un tournant.
Mary Tudor catholicise l'Angleterre à nouveau, tisse des liens avec Rome, lutte contre les lollards, d'où son surnom de Bloody Mary. Elisabeth Iè se sert de l'image affreuse du catholicisme établie par Mary pour se tourner à nouveau vers des idées réformées et c'est elle qui trouve la via media et stabilise les choses.

Lucy Austen

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Date d'inscription : 14/03/2017

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Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle. Empty Re: Chapitre 2 : les innovations religieuses en Europe au XVIème siècle.

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